Summary: | Ce mémoire a comme objets la gouvernance internationale des changements climatiques et de la santé, la politique étrangère canadienne en Arctique, de même que le pouvoir d'influence des Organisations non-gouvernementales (ONG). L'observateur attentif des négociations internationales sur les changements climatiques (CC) aura remarqué que le gouvernement canadien dirigé par Stephen Harper tient deux discours différents. D'une part, il y a le scepticisme avoué qui caractérise la position de la délégation canadienne dans les négociations entourant la Convention cadre des Nations unies pour les changements climatiques (CCNUCC); d'autre part, le discours sur les CC dans le cadre de la politique arctique du gouvernement, qui est plus volontariste et témoigne d'une plus grande préoccupation. Au-delà des apparences, peut-on quantifier cette dichotomie discursive? En effet, à la suite d'une analyse de contenu des discours du gouvernement Harper faite à l'aide des logiciels informatiques QDA Miner et Tropes (Chapitre 4), il apparaît que ce dernier fait référence au concept de développement durable, à la santé environnementale et à l'urgence d'agir pour atténuer les CC 2,41 fois plus fréquemment dans le corpus Arctique que dans le corpus dit de gouvernance internationale des CC. L'analyse des co-occurrences révèle aussi que pour le corpus Arctique, le gouvernement Harper est plus volontariste, prend des engagements et mobilise un style narratif, alors que dans le corpus de la gouvernance internationale des CC, il se dégage de ses responsabilités, n'engage pas son gouvernement et apparaît comme plus prosélyte. Qu'est-ce qui peut bien pousser le gouvernement canadien à prononcer deux discours différents au sujet des changements climatiques? Au troisième chapitre, l'analyse de la genèse et de la nature du discours du Conseil Inuit circumpolaire (CIC) permettra d'apprécier les stratégies qu'il a déployées dans ses multiples entreprises internationales de lobbying, depuis sa création par Eben Hopson en 1977. Le développement du discours du CIC peut être divisé en deux phases. La première porte sur les revendications territoriales et la participation des Inuit à la gouvernance de l'extraction des ressources naturelles; la seconde, soit celle que nous étudierons dans ce mémoire, vise le respect de l'environnement arctique pour des raisons de santé publique. Pour cette deuxième phase du développement discursif du CIC, nous avons schématisé les quatre étapes de sa stratégie de lobbying, soit : 1) l'appui sur des conclusions scientifiques, 2) un argumentaire basé sur les droits de l'Homme et la santé publique, 3) l'utilisation des organismes internationaux afin de se faire entendre auprès des gouvernements visés et enfin, 4) les pressions sur le gouvernement canadien afin que ce dernier matérialise ses préoccupations de santé environnementale dans des textes de lois et des conventions internationales. Afin de montrer l'impact du CIC sur le discours du gouvernement, le cinquième chapitre fera le pont entre la dichotomie discursive mesurée quantitativement et qualitativement au chapitre 3, et les pressions discursives schématisées au chapitre 4. Pour y arriver, un cadre théorique de relations internationales élaboré à partir des cadres théoriques de Bas Arts (2003) et de Correll et Betsill (2001) sur le pouvoir discursif des ONG est employé. Ce cadre nous a permis d'évaluer que le niveau de pressions discursives sur le gouvernement canadien par le CIC est élevé, et d'affirmer que ce dernier a bel et bien exercé un pouvoir discursif sur le gouvernement.
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