Summary: | Une étude comparative entre deux auteurs aussi dissemblables que Pascal et Baudelaire s’annonce comme une entreprise risquée et se heurte à des obstacles apparemment infranchissables. Cette tentative relèverait-elle donc de l’exercice de style gratuit ou du paradoxe séduisant mais fragile ? Il semble, cependant, au regard de nombreux commentateurs, que des liens subtils unissent, au delà des divergences éclatantes, les deux univers littéraires. Ils présentent, en effet, des affinités réelles, puisées dans un fonds commun de tradition janséniste et développent des thèmes similaires centrés sur la misère et la grandeur de l’homme, l’importance de la chute originelle, les échecs qui en découlent dans la quête du bonheur, de la justice et de la vérité, les limites de la raison et la désespérance d’une condition humaine que l’absence de Dieu prive de sens. Certes, ces postulats analogues n’entraînent nullement, chez nos deux auteurs, des choix existentiels identiques, mais ils éclairent indiscutablement leur style et leur démarche. Si le vécu de la foi, la plénitude de la grâce illuminent les écrits pascaliens, l’œuvre baudelairienne ne laisse-t-elle pas poindre, par delà le péché, la révolte et la mort, une espérance diffuse, aux contours indécis mais aux accents incontestables ? Sans prétendre apporter une réponse définitive à ces délicates questions, le présent essai ambitionne modestement de raviver l’intérêt d’un passionnant et troublant face-à-face entre deux écrivains emblématiques que les styles, les préoccupations et les époques rendent à la fois si éloignés et si proches l’un de l’autre. === A comparative study of two authors as dissimilar as Pascal and Baudelaire is a daring undertaking, coming up, as it does, against apparently insuperable obstacles. Could one say then that this endeavour is simply a matter of an unwarranted exercise in style or of an appealing yet fragile paradox ? Notwithstanding, in the view of many commentators, it seems that subtle links unite the two literary universes, beyond manifest differences. They present, indeed, real affinities, that are drawn from a common fund of traditionaly Jansenist ideas and develop similar themes centred on the wretchedness and the grandeur of Man, on the importance of the Fall, on the failures which flow from original sin in Man’s search for happiness, justice and truth, on the limits of reason and the desperation of the human condition which the absence of God deprives of meaning. Certainly, these similar basic premises do in no way entail in the two authors identical existential choices, but they unquestionably shed light on their style and their reasoning. If the real life experience of faith and the plenitude of grace illumine Pascal’s writings, the faint outlines and the indisputable undertones of a diffuse hope, beyond sin, revolt and death, emerge from Baudelaire’s work. Without claiming to bring a definitive answer to these delicate questions, the present essay has the modest ambition of rekindling interest in a passionate, yet unsettling encounter between two emblematic writers, whose styles, concerns and centuries render them so distant from, yet so close to each other.
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