Summary: | La drépanocytose, pathologie génétique de l'hémoglobine la plus fréquente en France, se caractérise par des crises douloureuses paroxystiques, dont la survenue apparaît souvent depuis la plus jeune enfance. La majorité des individus rencontrés en métropole française sont issus de la migration, provenant de départements d'Outre-Mer et de pays d'Afrique Sub-Saharienne.Par une méthodologie qualitative, nous observons les répercussions des crises douloureuses pathognomoniques de la drépanocytose, que nous considérons comme traumatogènes, sur la dynamique identitaire de sujets adultes. D'une part, nous suggérons que ces crises se figurent tel un évènement déstructurant, menaçant l'équilibre identitaire du sujet, de par l'imprévisibilité de leur survenue et leur risque létal. D'autre part, au vu de cette potentialité traumatique, nous les envisageons comme structurant la dynamique psychique du sujet, au travers des modalités singulières que ce dernier entretient avec son corps. La confrontation au Réel de la Mort, le vécu d’effroi, la menace d’annihilation psychique causée par la douleur, ainsi que leur répétitivité et le sentiment d’incertitude quant à leur soulagement, inscrivant parfois le sujet dans un temps dissociatif long, dévoilent un risque de développer un syndrome psychotraumatique. Pour autant, de par leur récurrence, elles engendrent une relation au corps où le sujet anticipe le surgissement de la douleur, laquelle apparaît tel un repère sensoriel, même latent, auquel il se fie pour se mouvoir dans son environnement.Dans cette visée exploratoire, nous appréhendons le sentiment et la construction identitaire des sujets, notamment au regard des étiologies plurielles affiliées à la drépanocytose, relatives aux savoirs profanes de la culture d’origine et aux savoirs médicaux disponibles. Ces diverses explications causales génèrent des représentations et des désignations socio-culturelles du sujet drépanocytaire, particulièrement dans le pays d’origine. Le processus identitaire semble malmené par les contraintes liées à la maladie, contribuant au sentiment d’être différent des autres, lequel est également alimenté par ces spécificités socio-culturelles. Au-delà des bouleversements identitaires liés à la migration, l’analyse met en exergue les réactions et les ressources employées face à la maladie, et illustre les mouvements de distanciation des sujets face à une identité parfois vécue comme « subie ».En outre, nous avons recueilli des données quantitatives concernant l’observance thérapeutique, les niveaux d’anxiété, de fatigue, de catastrophisme, ainsi que les croyances et les perceptions associées à la douleur. En moyenne, les sujets déclaraient être observants quant à leur traitement. Les niveaux moyens d’anxiété et de catastrophisme se sont avérés modérés. La fatigabilité s’orienterait sur une dimension sensorielle et affective plutôt que comportementale et cognitive. Concernant leur douleur, les sujets avaient tendance à l’appréhender comme mystérieuse et pérenne, ne se percevaient que peu coupables quant à sa présence et semblaient hésitants sur son caractère intermittent ou continu.Le premier axe d’étude de l’hypnose et de la pratique de l’autohypnose s’attachait à les estimer en tant que facteurs d’atténuation des symptômes mesurés par le biais des échelles d’évaluation. Le deuxième intéressait la nécessaire dimension intersubjective de l’hypnose. Aucune différence significative n’a été retrouvée entre les deux temps de mesures qui suggérerait une efficacité symptomatique de l’hypnose. Au travers du discours des sujets, l’influence de l’hypnose résiderait dans la (ré)appropriation du vécu du corps et de l’histoire subjective grâce à l’investissement relationnel sécurisant au praticien. Enfin, la pratique de l’autohypnose se révélerait efficace en tant que réactualisation de cette relation, mobilisant le sujet dans un engagement à lui-même. === Sickle-cell disease, the most common genetic pathology of haemoglobin in France, is characterized by painful paroxysmal pain attacks, often occurring since early childhood. The majority of the individuals met in the French metropolis are migrants, coming from overseas departments and countries in Sub-Saharan Africa.Using a qualitative methodology, we observe the repercussions of painful pathnomonic crisis in sickle-cell disease, which we consider traumatogenic, on the identity dynamic of adult subjects. On one hand, we suggest that these crises appear as a destructuring event, threatening the subject's identity balance, due to the unpredictability of their occurrence and their lethal risk. On the other hand, in view of this traumatic potentiality, we consider them as structuring the psychic dynamics of the subject, through the peculiar modalities that he maintains with his body. The confrontation with the Reality of Death, the experience of dread, the threat of psychological annihilation caused by pain, as well as their repetitiveness and the feeling of uncertainty as to their relief, sometimes placing the subject in a long dissociative time, reveal a risk of developing psychotraumatic syndrome. However, because of their recurrence, they generate a body relationship where the subject anticipates the onset of pain, which appears as a sensory reference point, even latent, which he relies on to live in his environment.In this exploratory aim, we apprehend the feeling and identity construction of subjects, particularly in regard of the plural etiologies affiliated with sickle-cell disease, related to the secular knowledge of the culture of origin and the medical knowledge available. These various causal explanations generate socio-cultural representations and designations of the sickle cell disease subject, particularly in the country of origin. The identity process seems to be mishandled by disease related constraints, contributing to the feeling of being different from others, which is also fuelled by these socio-cultural specificities. Beyond the identity changes linked to migration, the analysis highlights the reactions and resources used in dealing with illness, and illustrates the movement of subjective distanciation subjects from an identity that is sometimes experienced as "undergone".In addition, we collected quantitative data on adherence, anxiety, fatigue, catastrophizing, and beliefs and perceptions associated with pain. On average, subjects reported being observant about their treatment. Average levels of anxiety and catastrophizing were moderate. Tiredness would tend to a sensory and emotional dimension rather than a behavioural and cognitive one. Regarding their pain, subjects tended to perceive it as mysterious and lasting, don’t feel guilty about its presence and seemed hesitant about its intermittent or continuous nature.The first axis of study of hypnosis and the practice of self-hypnosis focused on estimating them as mitigating factors for symptoms measured through assessment scales. The second concerned the necessary inter-subjective dimension of hypnosis. No significant differences were found between the two measurement times that would suggest symptomatic efficacy of hypnosis. Through the subjects' words, the influence of hypnosis could be seen in the (re)appropriation of the body's experience and subjective history thanks to the practitioner's secure relational investment. Finally, the practice of self-hypnosis would prove to be effective as an update of this relationship, mobilizing the subject in a commitment to himself.
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